La Boxe Occidentale
LE PUGILAT ANTIQUE
Etymologiquement, le mot « poing » vient du latin pugnus (en grec pugme), « main de fer ». La même racine a donné « pugilat ». C’est d’ailleurs dans le pugilat qu’il faut trouver l’origine de la boxe. Ainsi, le pugilat faisait partie des exercices palestriques.
On trouve des traces de confrontations à mains nues à la période sumérienne (-3500 à -1500 avant J-C). Mais ce sont les Grecs qui en ont fait un « sport ». Outre le pugilat, ceux-ci pratiquaient le lancer de disque, la course, le saut, la lutte. Au pugilat, les mouvements se réduisaient à frapper et à parer les coups. Les athlètes du pugilat, les pugilistes (synonyme aujourd’hui de boxeurs), portaient une sorte de longue écharpe qui couvrait en partie leur corps et cachait les organes sexuels. Mais cette sorte de ceinture fut supprimée lors de l’introduction de ce sport aux jeux Olympiques. Ils se protégeaient les mains avec des lanières de cuir appelées cestes. Les cestes se composaient de plusieurs courroies ou bandes de cuir montant jusqu’au coude, entrelacées de façon qu’elles couvrent le dos de la main et les premières phalanges. Les pugilistes enroulaient leurs cestes aussi serrés que possible pour éviter la fracture des os de la main. Le ceste fut peu à peu renforcé, ou plus exactement aggravé, de clous de bronze et de boules de plomb, qui transformèrent le poing en une arme meurtrière.
Homère, dans l’Iliade (chant XXIII), avec une étonnante précision technique, nous décrit le combat qui opposa Epeios à Euryale avec une mule pour enjeu : « Debout, face à face au centre de l’arène, ils lèvent haut leurs mains lourdement gantées. Leurs poings s’entrechoquent dans un furieux corps à corps : leurs mâchoires craquent horriblement, la sueur ruisselle sur leurs membres. Mais le divin Epeios s’élance tandis que l’autre jette autour de lui un regard éperdu, il le frappe d’un coup puissant en plein menton… ». Hercule, Thésée, Castor, Pollux et Apollon lui-même sont célébrés pour leur excellence dans cet art. Introduit dans tous les gymnases de la Grèce, le pugilat fut admis au nombre des jeux Olympiques, où il fit son entrée lors de la XIII ème olympiade.
On peut donc dater l’apparition du pugilat comme sport de combat de 684 avant J-C. C’est Onomaste, athlète de Smyrne, qui remporta la première place. Tissandre de Naxos triompha quatre fois dans cette discipline, en 572, 568, 564, et 560 avant J-C. Un record jamais égalé depuis. Plus rude et plus dangereux que les autres sports olympiques, le pugilat devint d’une violence inouïe : les pugilistes mourraient quelquefois, et très souvent ils sortaient du combat le visage défiguré et devenaient difformes. En complète décadence, le pugilat disparut avec les jeux Olympiques et la chute de l’Empire romain. En 394 avant J-C, l’Empereur chrétien romain Flavius Theodosius interdit les jeux Olympiques, symbole de paganisme ; le pugilat tomba dans l’oubli.
L’ERE MODERNE
Londres, 1681. Dans la revue « The London Protestant Mercury », on peut lire l’entrefilet suivant : « Hier, une rencontre de pugilat a eu lieu en présence de S. Gr. le duc d’Albermarle. Elle mettait aux prises son majordome et son boucher. La victoire est revenue au second, comme de nombreuses fois auparavant. On peut considérer que malgré sa petite taille, il est actuellement le meilleur d’Angleterre dans ce sport. » C’est le premier compte-rendu d’un match de boxe de l’ère moderne.Dans l’Angleterre de cette fin de XVII ème siècle, ce sport, qui n’est que la résurgence du pugilat antique et que l’on appellera plus tard boxe anglaise, en référence au pays de sa renaissance, devient le nouveau hobby de quelques nobles et de gens fortunés.
En quête de divertissements, les Anglais imaginent d’opposer leurs serviteurs, ou bouchers, ou jardiniers, dans des luttes à poings nus. Ces combats font l’objet de paris. Ils se déroulent dans des prés, des cours, des étables ou des arrières salles. La limite de la surface d’évolution n’est pas imposée : elle varie en fonction de l’assistance, puisque ce sont les spectateurs, en l’occurrence les parieurs, qui forment un cercle autour des deux combattants. Les règles ne sont pas très précises : pas de durée limite : le combat prend fin lorsque l’un des deux boxeurs abandonne. Tous les coups sont autorisés ; seul le coup bas, porté au dessous de la ceinture, est interdit.
L’essentiel de la technique se résume en un conseil : frapper le plus fort possible. Le jeu de jambes et le jeu défensif n’existent pas. En fait, la seule différence entre cette forme de boxe et le pugilat antique est l’absence de cestes, les hommes n’usant que de leurs poings nus. Il est facile d’imaginer les accidents qui pouvaient en résulter… En instaurant les paris et en engageant des sommes parfois importantes, une certaine catégorie sociale anglaise va développer la popularité de la boxe dans toute l’Angleterre.
Ainsi, à partir de 1700, selon l’historien anglais Pierce Egan, la plupart des journaux britanniques, y compris le Times, publient des comptes-rendus détaillés de tous les combats et vont également encourager les vocations. Les hommes forts se font rapidement connaître, deviennent riches et célèbres : ce seront les premières stars sportives de l’ère moderne.
A partir du début du XVIII ème siècle, l’histoire de la boxe se confond avec celle de ses illustres champions. James Figg, un Anglais né en 1695 à Thame, un village de l’Oxfordshire, est le premier champion officiellement reconnu. Vagabond, bagarreur et doué d’un certain sens de la mise en scène (il se rasait le crâne pour empêcher ses rivaux de le saisir par les cheveux), Figg devint vite renommé. Aussi habile dans l’art de manier le bâton que dans celui d’utiliser les poings, Figg, à 24 ans, et après une multitude de succès contre les « gros durs » à travers toute la Grande-Bretagne (19 victoires consécutives répertoriées), se proclame en 1719 champion du monde. Un mode réduit, il est vrai, à la Grande-Bretagne. Riche et apprécié par la gentry londonienne, Figg se lie d’amitié avec le comte de Peterborough. Celui-ci offre un amphithéâtre dans la banlieue de Londres à Tottenham Court Road pour lui permettre d’ouvrir une académie de boxe. Dans une arène en bois où mille personnes s’asseyaient, Figg sur une scène ronde enseignait ses talents. L’endroit connut un succès considérable auprès du peuple, mai surtout auprès des nobles et des gens fortunés, qui décidèrent d’ouvrir des écoles un peu partout en Angleterre ; on en dénombrait 11 dans la seule ville de Londres en 1725. En 1730, James Figg a 35 ans ; invaincu, il se retire. Il mourra quatre ans plus tard. Voici ce qu’écrivit à son sujet le Gentleman’s Magazine dans son numéro de janvier 1735, soit trois mois après son décès : « En Figg, la force, la résolution et un extraordinaire jugement étaient réunis pour faire de lui un maître incomparable. Il avait une majesté qu’il montrait dans sa contenance et qui étincelait dans tous ses actes. »
Le mérite de Figg et son rôle dans le développement de ce sport ne résident pas uniquement dans la création de son école de boxe, mais surtout dans sa découverte d’un jeune marinier de Cirencester qui allait devenir le père de la boxe, Jack Broughton. En 1743, ce dernier fonde une Académie. Il est l’inventeur du « jeu de jambes ». La boxe anglaise va rapidement s’organiser.
En 1857 sont édictées les règles du marquis de Queenberry. Ce sont les premiers et véritables règlements de boxe. Ils comportent une interdiction formelle du corps à corps, du combat à mains nues, de l’étouffement et des coups pendant une blessure de l’adversaire. Les rencontres durent 3 minutes, avec un temps de repos de 1 minute. Le boxeur immobilisé au sol plus de dix secondes perd le match. En 1892 se déroule le premier championnat du monde de boxe avec des gants. En France, le premier combat n’a lieu qu’en février 1903, dans la mythique salle Wagram à Paris. La Fédération française des sociétés de boxe, future Fédération française de boxe (FFB), est alors créée. Les premiers championnats s’organisent ; rien n’arrêtera plus le développement populaire de la discipline. La boxe amateur fait partie intégrante des disciplines olympiques depuis 1904, année au cours de laquelle on assiste à la première rencontre interclubs entre Français et Anglais. Trois ans plus tard, en 1907, la boxe professionnelle prend son essor en France. Enfin, 1946 voit la création de l’Association internationale de boxe amateur (AIBA).
DEFINITION DE LA BOXE ANGLAISE
La boxe anglaise peut être définie comme un duel présentant certaines caractéristiques, le statut du boxeur étant celui d’un « frappeur » qui s’associe à un sport de percussion, en opposition aux sports de préhension comme la lutte ou le judo.
C’est un affrontement durant lequel nous ne pouvons frapper l’adversaire qu’avec une certaine surface de frappe autorisée sur le gant (la partie recouvrant la tête des quatre derniers métacarpiens et les premières phalanges des deux poings).
Nous ne pouvons également atteindre l’autre que sur une surface (cible) bien délimitée (elle se situe sur la face antérieure et les côtés de la tête et du buste en partant du sommet du front, et ce jusqu’au niveau de la ceinture, cette dernière étant définie comme une ligne imaginaire horizontale passant par le sommet des hanches).
L’affrontement se déroule dans un espace de forme carrée (de 4,90 à 6,10 mètres de côté) délimité par trois ou quatre cordes tendues à l’horizontale les unes au dessus des autres. Le temps est découpé en périodes d’action (leur nombre et leur durée variant en fonction du niveau des boxeurs) et de repos (les repos étant toujours de 1 minute, quels que soient la durée et le nombre de reprises). Toute la singularité de la boxe anglaise se trouve ainsi présentée par la simple énumération de ces six éléments : statut de frappeur, face à face, surface de frappe, cible autorisée, espace délimité et temps. A partir de cette définition de la boxe anglaise, nous pouvons maintenant déduire les caractéristiques de l’affrontement. Caractéristiques primordiales, qui seront en permanence à prendre en compte par tout boxeur et tout entraîneur.
CARACTERISTIQUES DE L’AFFRONTEMENT
Chaque combattant est tenu de respecter scrupuleusement la « règle » inscrite dans la prise en compte des six éléments précédemment cités. Il doit obéir encore à une foule de détails respectant les « règlements » et justifiant la présence permanente de l’arbitre. Le boxeur a un objectif qui peut se résumer ainsi : atteindre l’autre sur la cible autorisée, le plus souvent possible pendant la durée de l’affrontement, sans sortir de l’espace délimité. Il s’assure ainsi, aux yeux des juges et des spectateurs, la domination de son adversaire. Nous voyons bien que le problème qui se pose aussitôt réside dans le fait que l’autre entreprend simultanément la même démarche, ce qui engendre une incertitude relative à la présence de ces deux volontés contraires. Il s’agit donc de gérer cette incertitude, voire d’y mettre fin le plus rapidement possible :
– Si l’on peut abréger la durée de l’incertitude en frappant l’adversaire de manière qu’il abandonne, nous sommes alors dans une situation de combat ;
– Si cette solution est rigoureusement interdite, nous sommes alors dans la perspective de l’assaut.
LES FONDAMENTAUX :
LA GARDE
C’est une attitude obtenue par la combinaison de l’orientation du corps et la position des bras par rapport à l’adversaire. Elle est propre à chaque boxeur (garde à droite ou à gauche), doit protéger la cible autorisée et permet d’attaquer et de défendre.
LES DEPLACEMENTS
A partir d’une position de garde par rapport à un adversaire (position de référence), les déplacements sont de différentes natures : latéraux, antéropostérieur, en diagonale et en pivots. Toutes les formes de déplacements peuvent être utilisées à partir du moment où le boxeur reste stable et dans les meilleures conditions pour se protéger et attaquer (le déséquilibre doit être évité).
PLACEMENT/CADRAGE
C’est la position d’un adversaire par rapport à l’autre, impliquant les notions de distance, de garde et d’angle d’attaque.
LES DIFFERENTS COUPS
Les coups peuvent être classés en trois familles : « directs », « crochets » et « uppercuts ». Nous pouvons aussi les différencier en parlant de coups longs délivrés à distance et de coups courts délivrés à mi-distance.
LE DIRECT
A partir de la position de référence qui correspond à un cadrage idéal, le direct peut être déclenché sans déplacer les appuis. C’est un coup délivré à distance, directement par extension rapide et totale du bras, à partir d’une forme de corps en ligne. S’oppose à la forme de corps circulaire du crochet.
LE CROCHET
Le crochet est un coup délivré à mi-distance, avec le bras semi fléchi, à partir d’une forme de corps circulaire.
L’UPPERCUT
C’est un coup délivré à mi-distance avec le bras semi fléchi, à partir d’une forme de corps en « hélice » (poussée de la jambe et rotation de la hanche vers le haut).
LES MOYENS DE DEFENSE
Différents moyens de défense sont à la disposition du boxeur, qui les combine et qui doit rapidement être capable de se placer pour frapper en contre-attaque.
L’ARRET
C’est un coup qui arrête l’attaque adverse dès son déclenchement, c’est-à-dire avant même que l’adversaire n’ait délivré son propre coup.
LE BLOCAGE OU LA PARADE BLOQUEE
C’est un geste défensif permettant d’arrêter un coup en interposant le poing, la main ou l’avant-bras.
LE CHASSE OU LA PARADE CHASEE
C’est un geste défensif permettant de dévier un coup par l’usage du poing, de la main ou de l’avant-bras.
LE DECALAGE
C’est le placement du corps hors de l’axe de l’attaque adverse par déplacement d’un ou de deux appuis. On parle de décalage intérieur et de décalage extérieur par rapport à la garde de l’adversaire.
L’ESQUIVE
C’est un mouvement défensif du corps permettant d’éviter un coup. On distingue les esquives de corps (sans déplacement des appuis), les esquives partielles (avec déplacements d’un appui), les esquives totales (avec déplacements des deux appuis) et les esquives rotatives.
LE RETRAIT
C’est un mouvement du corps vers l’arrière (on parle souvent de « retrait du buste »).